" Gordon Brown est devenu, mercredi 27 juin, le cinquante-deuxième premier ministre britannique, prenant la succession de Tony Blair, qui a démissionné après dix années passées à la tête de l'exécutif. Cinquante-cinq minutes après être arrivé au palais de Buckingham en compagnie de son épouse Sarah, Gordon Brown en est ressorti chargé par la reine Elizabeth de former un nouveau gouvernement.
Le nouveau chef de l'exécutif britannique s'est ensuite dirigé vers le 10, Downing Street, pour prendre possession de sa nouvelle résidence officielle, que Tony Blair a quittée avec sa famille en début d'après-midi. "Et maintenant, que le changement commence", a lancé Gordon Brown, souriant, à la foule. Promettant un "un nouveau gouvernement avec de nouvelles priorités", il s'est engagé à faire de "son mieux".
GOUVERNEMENT OUVERT AUX AUTRES SENSIBILITÉS
"Je construirai un gouvernement de tous les talents", a affirmé le nouveau premier ministre, qui pourrait annoncer dès jeudi la composition de son cabinet. Celui-ci devrait rassembler nouveaux venus et figures connues des années Blair, comme l'ancien ministre des affaires étrangères Jack Straw et le ministre du commerce et de l'industrie Alistair Darling, pressenti aux finances.
Devant les délégués travaillistes qui l'ont officiellement investi dimanche à Manchester, Gordon Brown a promis un nouveau style de gouvernement, plus ouvert à d'autres sensibilités politiques. Même si ses premières approches ont échoué – Paddy Ashdown, ancien chef de file des libéraux-démocrates, a décliné une proposition ministérielle –, M. Brown devrait poursuivre sur cette voie de l'ouverture, au moins pour former des majorités parlementaires dépassant le cadre partisan sur des questions cruciales comme l'environnement ou les droits du Parlement.
TOURNER LA PAGE DU "BLAIRISME"
Gordon Brown hérite de son prédecesseur d'une situation délicate, qui s'explique largement par l'intervention militaire en Irak, désavouée par une majorité de l'opinion publique. Il va devoir s'attacher à reconquérir l'électorat s'il veut reconduire la majorité parlementaire du Labour lors des prochaines législatives, face à une opposition conservatrice renaissante en tête des sondages depuis l'automne dernier.
Le nouveau chef du gouvernement, âgé de 56 ans, doit aussi marquer son autorité et tourner la page du "blairisme", ce qui est loin d'être une sinécure : mardi, alors que son arrivée à la tête du gouvernement aurait pu le propulser en ouverture des journaux, c'est la probable nomination de Tony Blair au rang d'émissaire du Quartet des médiateurs internationaux au Proche-Orient qui a dominé l'actualité.
L'entourage du futur ex-chancelier espère que le style plus austère de Gordon Brown lui donnera le soutien d'anciens électeurs travaillistes déçus par ce qu'un parlementaire du Labour a appelé le style "strass et paillettes" de Tony Blair. Ces dix années de l'histoire du Labour ont en effet été dominées par la rivalité parfois vive entre le charismatique Tony Blair, à la tête du parti depuis 1994, et Gordon Brown, plus cérébral mais tout aussi ambitieux. "
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